Modes d'attachement sécure et insécure

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Modes d'attachement sécure et insécure

Pascal Patry praticien en psychothérapie, thérapeute et astropsychologue à Strasbourg 67000
Publié par Pascal Patry dans Psychologie · Mercredi 04 Oct 2023
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Modes d'attachement sécure et insécure

Il est nécessaire d’exposer les différents modes d’attachement sécure et insécure qui apparaissent dans le contexte d’expériences de caregiving [1] différentes.

La théorie de l’attachement repose sur le présupposé que les différents comportements dont les enfants font preuve dans leurs relations avec les autres et les différents modèles internes opérants sous-jacents à ces comportements sont en grande partie attribuables aux différents types de caregiving dont ils ont bénéficié.

Les dimensions du caregiving

Les dimensions du caregiving associées aux différentes conséquences sur le plan de la sécurité et de l’insécurité durant la première enfance ont été identifiées par Ainsworth et al. (1978).

Elles semblent particu­lièrement utiles pour comprendre les origines des modes d’attachement. Ces dimensions, qui sont la disponibilité, la sensibilité, l’acceptation et la coopération, font ici l’objet d’une présentation, laquelle sera utilisée plus loin pour être reliée à la façon dont le caregiving peut favoriser la sécurité dans le cadre du placement et de l’adoption.

Le point clé de ce modèle est le fait qu’il s’agit de dimensions, c’est-à-dire que les parents se situent quelque part entre, par exemple, la disponibilité et l’indisponibilité, la sensibilité et l’insensibilité, l’acceptation et le rejet, la coopération et l’intrusion.

• La disponibilité - aider l’enfant à avoir confiance. Afin de faire bais­ser l’anxiété de l’enfant, la capacité du parent de rester disponible et accessible pour l’enfant lorsque celui-ci recherche la proximité pour les soins et la protection est essentielle.

L’enfant apprend que les lignes de communication avec la figure d’attachement sont ouvertes, que l’adulte va garder l’enfant à l’esprit et qu’il réagira s’il sollicite son aide. Cela permet à l’enfant de disposer d’une base de sécurité à partir de laquelle il peut se risquer à explorer, jouer et apprendre.

• La sensibilité - aider l’enfant à contrôler ses sentiments et son comportement. Les parents sensibles peuvent voir le monde en adop­tant le point de vue de l’enfant, et traiter ce dernier comme ayant un esprit qui doit être compris. Ils sont à l’écoute des signaux que l’enfant émet concernant ses besoins ainsi que des expressions de ses sentiments, et ils utilisent ce qu’ils ont compris pour réagir en sorte de faire baisser l’anxiété et d’aider l’enfant à contrôler ses sentiments et son comporte­ment.

Ils procurent un étayage pour l’expérience, et ce en identifiant les sentiments comme en réagissant à ces derniers, et en donnant à l’enfant la possibilité de réfléchir, de faire une pause pour penser lorsque des sentiments forts doivent être contrôlés.

• L’acceptation - construire l’estime de soi chez l’enfant. Les parents qui acceptent l’enfant et le valorisent comme un être à part entière comprennent que chaque enfant est un être unique et complexe, avec des caractéristiques, des forces et des difficultés particulières.

Les enfants qui reçoivent le message qu’ils sont acceptés et valorisés pour ce qu’ils sont par des personnes importantes dans leur vie développent un concept de soi équilibré, réaliste mais positif, ainsi qu’une bonne estime de soi.

• La coopération - aider l’enfant à se sentir efficace/à être coopératif. Les parents coopératifs non seulement comprennent que les enfants, dès leur naissance, doivent s’affirmer, mais de plus favorisent active­ment l’efficacité et l’autonomie de l’enfant. Ils forment une alliance de coopération avec l’enfant, suivent l’initiative de ce dernier plutôt que de faire preuve d’intrusion, permettent à l’enfant de diriger le jeu et soutiennent ses choix.

Ils fournissent des limites de sécurité à l’inté­rieur desquelles le comportement peut être négocié, les enfants pouvant s’adapter à l’échec et se réjouir du succès.

À ces quatre dimensions identifiées par Ainsworth, nous en ajoutons une cinquième qui rend compte de la dimension psychosociale qu’est l’appartenance à une famille, un facteur important car il fournit une base de sécurité particulièrement pertinente en matière de placement familial.

• L’appartenance à une famille - aider l’enfant à faire partie de. Les enfants ont besoin de grandir en sachant qu’ils ont une place sécure à l’intérieur d’une famille à laquelle ils appartiennent. Les enfants apprennent qu’ils ont à la fois des droits et des responsabilités à l’égard des autres membres de la famille.

Cette expérience d’appartenir à une nouvelle famille doit être entretenue de manière active, tout en soute­nant, chez l’enfant, le sentiment d’appartenir à une famille biologique. L’équilibre entre les deux familles dépend de la procédure de place­ment, mais même en cas de placement temporaire et de séjour de rup­ture, les enfants peuvent s’attendre à ressentir durant leur séjour qu’ils appartiennent à la famille d’accueil.

Sentir que l’on fait partie d’une famille est une base importante pour progresser sur le plan émotionnel et comportemental.

Si nous utilisons ces dimensions pour réfléchir à la manière dont les nourrissons et les enfants développent des stratégies pour se sentir en sécurité, il est possible de voir comment les modes d’attachement se forment.

• Sécure. Un attachement sécure survient si l’on prend soin avec sensibilité du nourrisson, si celui-ci a des parents disponibles, accessi­bles et souples, s’il se sent compris, accepté et valorisé, et s’il reçoit de l’aide pour faire des choix et être efficace.

Ces forces l’accompagnant durant l’enfance, l’enfant se forge une bonne estime de soi, développe son sentiment d’auto-efficacité ainsi que la capacité de réfléchir à ses pensées, ses sentiments et son comportement et de les contrôler. Il peut également devenir efficace à l’extérieur de la famille et y réussir.

À la fin de l’adolescence et à l’âge adulte, ce mode d’attachement est appelé autonome.

• Évitant. Lorsqu’il est difficile pour le parent d’accueillir les besoins du nourrisson ou d’y réagir avec sensibilité, le nourrisson peut estimer que ses demandes sont rejetées, ses sentiments minimisés, et que l’adulte essaie de prendre le dessus d’une manière intrusive, insensible.

Même si l’adulte qui montre du rejet continue à tenir le rôle de fournir des soins et de la protection, le nourrisson ou l’enfant apprend à ne pas révéler ses sentiments afin d’éviter de contrarier l’adulte et de provoquer son rejet ou son intrusion. Il est plus rassurant d’être indépendant et, de plus, cela augmente la probabilité que le parent reste à proximité.

À la fin de l’adolescence et à l’âge adulte, ce mode d’attachement qui consiste à minimiser l’importance des sentiments et des relations est appelé détaché.

• Ambivalent. À l’opposé, si le parent répond aux demandes du nour­risson, mais seulement de manière sporadique, imprévisible et parfois insensible, il est difficile pour le nourrisson de parvenir à la proximité de manière assurée.

Les soins et la protection sont parfois disponibles, mais le caregiving est incertain et inefficace. Au commencement, le nourrisson peut simplement adresser quasi constamment des demandes pour attirer l’attention de l’adulte et la conserver, ou bien, en l’absence de stratégie disponible, se montrer plutôt sans défense.

Avec le temps, le nourrisson se transforme en un enfant préoccupé, exigeant, collant mais méfiant, et résistant. À la fin de l’adolescence et à l’âge adulte, ce mode d’attachement est appelé préoccupé.

• Désorganisé. Lorsque le parent montre du rejet, est imprévisible et effrayant ou effrayé, le nourrisson est pris dans le dilemme de « peur sans solution » (Main et Hesse, 1990).

Les parents abdiquent leur rôle de caregiving, se représentant eux-mêmes comme ayant perdu le contrôle, et ils se montrent hostiles/impuissants à protéger l’enfant. L’instinct qui pousse le nourrisson à se rapprocher du parent pour obtenir ses soins et sa protection entraîne la peur et une anxiété accrue plutôt que diminuée.

L’absence de stratégie durant la petite enfance conduit à des comportements perturbés et désorganisés, mais au fil du temps, l’enfant commence à développer des comportements de contrôle, ce qui lui per­met de ressentir un certain degré de sécurité. Cependant, les sentiments d’anxiété et de peur demeurent non résolus et ils ressurgissent dans les moments de stress.

À la fin de l’adolescence et à l’âge adulte, ce mode d’attachement est appelé non résolu.

Un des points importants pour utiliser avec précision la théorie de l’attachement et les modes d’attachement dans la pratique réside dans le fait que les professionnels doivent se concentrer en premier lieu sur la distinction entre les modes d’attachement sécure et insécure. Il est inutile et peut même se révéler dangereux de penser en termes d’atta­chement « fort » ou « faible » et d’utiliser ce type de langage dans les évaluations.

Par exemple, un enfant ambivalent qui fait preuve de sen­timents extrêmes en cas de séparation n’est pas plus « fortement » atta­ché qu’un enfant évitant qui les dissimule. Les enfants désorganisés qui ont été abusés par leurs parents maintiennent des liens puissants envers eux. Les relations d’attachement sécure et insécure se sont toutes deux développées dans le contexte d’un besoin puissant de proximité, de soins et de protection.

Même si les stratégies comportementales et les modes relationnels qui apparaissent diffèrent, la « force » de la relation n’est pas un indicateur utile de leur influence sur le compor­tement de l’enfant ou de la valeur de la relation. Si l’on parle d’atta­chements « forts », le danger est que cette expression prenne le sens commun d’attachements « bons » voire « sécure ».

Cela peut même devenir, par exemple, un argument pour que l’enfant retourne dans sa famille biologique, pour que les contacts avec elle soient multipliés, ou pour ne pas poursuivre une procédure d’adoption. C’est particulière­ment vrai lorsque des enfants sont eux-mêmes devenus des caregivers pour leurs parents abusant d’alcool ou de drogue, ayant des troubles d’apprentissage, ou malades mentaux.

Les enfants peuvent nier avoir des problèmes et exprimer avec force leur désir/besoin de retourner chez eux (Forrester et Harwin, 2004). Dans de tels cas, l’emploi impro­pre de la théorie de l’attachement peut faire courir aux enfants le risque d’être de nouveau abusés ou négligés, ou bien de manquer l’occasion d’un placement permanent approprié.

Un autre point important est que les praticiens doivent établir la distinction entre les modes d’attachement insécure organisé et dés­organisé. Les modes insécure évitant et ambivalent sont des straté­gies organisées qui, jusqu’à un certain degré, « marchent ».

Ainsi, le nourrisson ou l’enfant évitant réussit effectivement à garder le parent à proximité en ne faisant pas trop de demandes, et le nourrisson ou l’enfant ambivalent réussit effectivement à obtenir un peu d’attention du parent en exprimant ses sentiments.

En revanche, le nourrisson désorganisé ne dispose d’aucune stratégie permettant de faire face à un parent qui augmente l’anxiété plutôt qu’il ne fournit de la protection. Même lorsque des enfants désorganisés commencent à développer des stratégies de contrôle, celles-ci ne consti­tuent pas des tentatives cohérentes de mettre en place une relation ; ce sont plutôt des manières de rester en sécurité.

Les enfants désorganisés maltraités peuvent aussi montrer des symptômes de dissociation ; ils se coupent de l’expérience et, là aussi, créent de la distance plutôt que des relations. C’est la désorganisation plutôt que l’insécurité elle-même qui représente le risque le plus important pour le développement.

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Note :

[1] - Dans la théorie de l'attachement, le caregiving, ou soin, désigne le rôle des figures d'attachement (souvent les parents ou les soignants primaires) dans la réponse aux besoins de l'enfant et dans la création d'un environnement sécurisant qui favorise le développement de l'attachement. La théorie de l'attachement, développée principalement par John Bowlby, met en lumière l'importance de la relation entre le nourrisson ou le jeune enfant et ses soignants pour le développement de liens émotionnels sécurisants.

Voici quelques concepts clés liés au caregiving dans la théorie de l'attachement :

   Sensibilité parentale : La sensibilité parentale fait référence à la capacité des parents ou des soignants à percevoir et à répondre de manière appropriée et prompte aux besoins émotionnels et physiques de l'enfant. Une réponse sensible renforce la sécurité de l'attachement de l'enfant.

   Réponse aux signaux de l'enfant : Les soignants doivent être en mesure de reconnaître et de répondre aux signaux émotionnels et aux besoins de l'enfant. Cela peut inclure la réponse à la faim, à la peur, au besoin de réconfort, de protection, d'affection, etc.

   Création d'un environnement sécurisant : Les soignants jouent un rôle crucial dans la création d'un environnement qui favorise un sentiment de sécurité pour l'enfant. Lorsque l'enfant sait qu'il peut compter sur ses soignants pour répondre à ses besoins, il développe un attachement sécurisé.

   Exploration et séparation : Les enfants ayant une base sécurisée grâce à des soignants réceptifs sont plus enclins à explorer leur environnement et à développer des compétences sociales et émotionnelles. Ils sont également plus aptes à gérer des périodes de séparation d'avec leurs soignants.

   Impact sur le développement ultérieur : La qualité des soins reçus pendant la petite enfance a un impact profond sur le développement ultérieur de l'enfant. Les enfants ayant une base d'attachement sécurisée sont plus susceptibles de développer des relations interpersonnelles saines et de mieux faire face au stress et à l'adversité.

   Styles d'attachement : La qualité du caregiving peut influencer la formation de différents styles d'attachement chez l'enfant, tels que l'attachement sécurisé, l'attachement anxieux ou l'attachement évitant. Ces styles d'attachement ont des implications sur la manière dont les individus gèrent les relations tout au long de leur vie.

Il est important de noter que la théorie de l'attachement ne se limite pas seulement à la petite enfance, mais a également des implications pour les relations et les interactions sociales tout au long de la vie. Elle met en évidence l'importance des relations de soin et d'attachement pour le bien-être émotionnel et social.


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Source : Guide de l’attachement en familles d’accueil et adoptives - La théorie en pratique





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Pascal Patry
Praticien en psychothérapie
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