Les oracles atlantéens. - Pascal Patry praticien en psychothérapie, thérapeute et astropsychologue à Strasbourg 67000

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Les oracles atlantéens.
Les lieux d’initiation de la période post-atlantéenne.
Le baptême du Jourdain.

Kassel, le 29 juin 1909

Nous avons vu que l’humanité était déjà sous la direction de guides pendant cette période de l’évolution que nous appelons la période atlantéenne, parce qu’elle s’est déroulée sur l’ancienne Atlantide ; et nous avons même vu combien la vie des hommes de ce temps différait de la nôtre, surtout en ce qui concerne la conscience personnelle. Cette conscience ne s’est développée que graduellement, et a succédé à une sorte de clairvoyance confuse. Nous savons également que pendant la période atlantéenne le corps humain était fait d’une substance beaucoup plus souple et plastique que celle d’aujourd’hui. La conscience clairvoyante nous apprend que l’homme, autrefois, ne percevait pas les objets extérieurs avec les contours précis que nous leur voyons aujourd’hui.

L’Atlante percevait déjà les minéraux, les plantes, les animaux - mais il les voyait confusément. De même que par les soirs de brouillards, nous voyons les lumières de la rue comme entourés d’un halo multicolore, ainsi l’homme voyait autrefois autour des objets comme une auréole colorée, une « aura ». Ces auras indiquaient la présence des êtres spirituels qui vivent dans les choses. La vision de ces êtres spirituels était plus ou moins confuse suivant les différents moments de la journée ; elle était très nette surtout au moment où l’homme passait de l’état de veille à celui de sommeil.

Pour prendre un exemple qui nous fera sentir plus vivement ce qu’était la conscience d’un Atlante, nous dirons qu’il n’aurait pas vu une rose avec les contours nets et précis que nous lui voyons. Elle lui aurait paru confuse, brumeuse, entourée d’auréoles colorées. Pendant le jour, les objets étaient indistincts ; mais ils le devenaient encore plus, jusqu’à disparaître complètement, pendant les phases intermédiaires entre le sommeil et la veille. En revanche, l’homme aurait vu très nettement ce que nous appelons « l’esprit de la rose », « l’âme de la rose ». Et il en était de même pour tous les objets qui l’entouraient. - L’évolution se poursuivit, et les objets extérieurs devinrent de plus en plus nets, tandis que la vue des êtres spirituels qui leur correspondaient devenait de plus en plus confuse.

En revanche, l’homme cultivait sa conscience personnelle ; il apprenait à se connaître toujours mieux. Nous avons déjà vu à quel moment de l’évolution le sentiment du moi apparut. Le corps éthérique et le corps physique coïncidèrent dans leur forme vers le dernier tiers de l’époque atlantéenne. Il est évident que les guides de l’humanité enseignèrent alors aux hommes toute autre chose que de nos jours.

On ne pouvait autrefois faire appel à la compréhension, au jugement des hommes. Les rapports réciproques reposaient alors sur des influences inconscientes qui passaient de l’un à l’autre. Il existait surtout une suggestion, une influence inconsciente qui n’exigeait que peu d’activité de la part de l’autre âme, et dont nous ne connaissons aujourd’hui que des vestiges mal connus et mal interprétés.

Dès qu’une image, un sentiment, naissait dans l’âme d’un homme, et que sa volonté se tournait vers un autre, il exerçait sur cet autre une forte influence. Toutes les influences étaient puissantes, et la volonté de les recevoir très forte également. Il ne reste plus de tout cela que des traces aujourd’hui. Supposons qu’un homme d’autrefois ait passé près d’un autre en faisant certains mouvements. L’autre, qui le regardait faire, se serait senti poussé à imiter tous ces mouvements. Il nous en est resté quelque chose : Si l’on regarde quelqu’un bâiller, on est pris de l’envie de bâiller aussi. Autrefois, les hommes étaient unis beaucoup plus étroitement.

C’est qu’ils vivaient dans une toute autre atmosphère que la nôtre. Aujourd’hui, l’air qui nous entoure ne contient beaucoup d’eau que lorsqu’il pleut. Autrefois, l’air était sans cesse empli d’une épaisse vapeur d’eau ; et pendant le début de la période atlantéenne, l’homme était fait d’une substance aussi molle que celle des animaux gélatineux qui vivent actuellement dans la mer et qu’on distingue à peine de l’eau qui les entoure. Peu à peu, l’homme prit de la densité.

Cependant, il est resté exposé à toutes sortes d’influences ; non seulement à celle des êtres spirituels supérieurs qui habitaient le Soleil, ou qui étaient répartis sur les différentes planètes de notre système solaire - mais aussi à celle des esprits lucifériens, qui s’exerçait sur son corps astral. Ceux qui devaient être les guides du peuple atlantéen devaient combattre dans leur corps astral ces influences lucifériennes. L’homme avait autrefois une conscience clairvoyante et spirituelle, et c’est pourquoi il percevait toutes les influences spirituelles qui se faisaient jour en lui. Un homme qui ignore la science spirituelle rirait aujourd’hui si on lui disait : « Ton corps astral est soumis à l’influence des esprits lucifériens ! » Mais il ne sait pas que cette influence est d’autant plus forte qu’il n’en a pas conscience.

« On ne voit pas le diable
« Même quand il vous tient au col. »

Cette parole du Faust de Gœthe est très profonde ; et bien des influences matérialistes ne se seraient pas exercées si les hommes avaient su qu’ils ne sont pas encore libérés de toute emprise luciférienne. Autrefois les maîtres et leurs élèves se surveillaient très strictement quant aux passions, désirs, instincts, qui poussaient l’homme vers le monde physique plus intensément que ne le voulait son évolution. Qui voulait devenir un maître devait avant tout cultiver une connaissance de soi qui discernât scrupuleusement tout ce qui pouvait venir de Lucifer. Il fallait savoir reconnaître dans son corps astral l’action des entités lucifériennes.

C’est ainsi qu’on les tenait à distance et qu’on pouvait voir les autres entités divines, celles qui avaient passé de la Terre sur le Soleil ou sur les autres planètes. Et, selon leur origine spirituelle, les hommes voyaient des êtres spirituels différents. Il y avait des âmes humaines qui venaient de Mars ; en combattant en elles-mêmes les influences lucifériennes, elles atteignaient à un degré plus élevé d’une clairvoyance plus pure, - et voyaient les entités spirituelles du royaume d’où elles venaient elles-mêmes, du royaume de Mars.

Celles qui étaient venues de Saturne arrivaient à voir les entités saturniennes ; celles qui venaient de Jupiter ou de Vénus en voyaient les entités. Chacun voyait ce qui lui correspondait. Mais les âmes humaines les plus élevées, celles qui avaient résisté à la crise lunaire purent arriver progressivement à voir non seulement les êtres spirituels de Mars, Jupiter ou Vénus, mais ceux du Soleil lui-même.

On comprend alors qu’il y ait eu sur l’ancienne Atlantide des institutions pour ceux qui étaient descendus de Mars et qui étaient aptes à étudier les mystères de Mars, d’autres pour ceux qui descendaient de Vénus et qui étudiaient les mystères de Vénus. Si nous donnons à ces institutions, à ces lieux, un nom né plus tard, celui « d’oracle », nous dirons qu’il y eut sur l’Atlantide un « oracle de Mars » où l’on étudiait les mystères de Mars, etc. Le plus élevé des oracles était « l’oracle du Soleil », et le plus grand des initiés celui qui était à la tête des initiés solaires.

L’enseignement qui y était donné tenait compte de la nature impressionnable de l’homme et des influences s’exerçant sur lui. Essayons de nous le représenter ; et supposons qu’il y ait eu des maîtres spirituels ayant reçu l’initiation comme par une sorte de grâce. Comment leurs élèves pouvaient-ils arriver à l’initiation ? Ceux qui étaient initiés exerçaient, déjà par leur seule apparition, par leur simple présence, une puissante influence sur leurs disciples.

Dès qu’un initié paraissait, tous ceux qui devaient devenir ses disciples sentaient vibrer en leur âme leurs facultés latentes. Des influences entièrement étrangères à la conscience de veille passaient alors d’un homme à l’autre ; et l’enseignement n’avait pas besoin d’être donné comme aujourd’hui. Toute la vie du maître, toutes ses actions, agissaient grâce à la faculté d’imitation des hommes, et passaient inconsciemment aux élèves.

C’est pourquoi il était très important que ceux qui, grâce à leur évolution précédente, étaient mûrs pour l’initiation, fussent conduits dans les lieux sacrés et vécussent avec le maître. Leur préparation - qui durait fort longtemps se faisait par la vue de tout ce que faisait ce maître et par les sentiments qu’il éveillait. Le moment venait alors où l’âme du maître et celle du disciple vivaient en si parfaite communion que tout ce que le maître savait, touchant les mystères supérieurs, passait dans l’âme du disciple. Qu’en advint-il après que le corps
éthérique s’unit entièrement au corps physique ?

Ils coïncidaient déjà à la période atlantéenne, mais le lien qui les unissait n’était pas encore très fort ; et il suffisait d’un effort de volonté de la part du maître pour dégager à nouveau le corps éthérique du disciple. Certes cela ne se produisait plus dès que tout ce qui vivait dans le maître était transmis à l’élève ; mais le maître avait encore le pouvoir de dégager le corps éthérique, et de révéler à son disciple ce qu’il voyait lui-même.

C’est alors que se produisit la grande catastrophe qui balaya le continent atlantéen. Des tempêtes formidables dans l’air et sur l’eau, de profonds bouleversements sur Terre transformèrent peu à peu la Terre toute entière. L’Europe, l’Asie et l’Afrique, qui n’étaient encore Terre ferme que dans une petite proportion, émergèrent de l’eau, ainsi que l’Amérique. L’Atlantide disparut. Les hommes émigrèrent vers l’Ouest et vers l’Est, et formèrent les plus diverses colonies.

Après cette immense catastrophe, l’humanité avait progressé. Un nouveau changement s’était produit dans les rapports du corps éthérique et du corps physique qui furent dorénavant beaucoup plus étroitement attachés l’un à l’autre. Il ne fut plus possible au maître de dégager le corps éthérique de son disciple par un acte de sa volonté pour y imprimer ce qu’il voyait lui-même. Il fallut donc que l’initiation prît une autre forme, et voici comment on pourrait la décrire.

L’enseignement donné par l’influence directe de l’âme du maître sur le disciple fit graduellement place à un mode d’enseignement qui se rapprocha de celui que nous connaissons. À l’époque atlantéenne il y avait eu des oracles ; ce furent maintenant des sortes d’Écoles que les maîtres de l’humanité fondèrent pour y redonner les échos des antiques oracles atlantéens ; l’apparition des Mystères, des lieux d’initiation, se fait aux temps post-atlantéens.

Autrefois, les élèves les mieux préparés avaient été reçus dans les oracles : désormais c’est dans les mystères qu’on les accueillit. Ils durent y être préparés par une instruction sévère, précisément pour cette raison qu’on n’allait plus agir sur eux comme précédemment. Nous trouvons dans toutes les civilisations et pendant de longues périodes ces sortes de mystères. Que l’on remonte vers la première civilisation post-atlantéenne, celle de l’Inde antique, ou bien vers la civilisation zoroastrienne, ou encore celle de l’Égypte, de la Chaldée, on voit partout que les disciples sont admis dans les mystères qui forment comme un intermédiaire entre l’église et l’école.

C’est là qu’ils reçoivent une discipline sévère qui leur enseigne à penser, à sentir non seulement ce qui vient du monde sensible, mais ce qui se passe aussi dans le monde spirituel, invisible. Ce qu’on y enseigne, nous pouvons le décrire d’un mot aujourd’hui, c’est en grande partie ce qui est redonné par l’anthroposophie ; tel est l’objet des études de ces mystères. On s’y adapte aux mœurs de l’époque et tout est réglé d’une façon rigoureuse ; non pas comme aujourd’hui, où la vie cachée des mondes supérieurs est révélée d’une manière relativement assez rapide et assez ouverte à des êtres qui sont déjà mûrs pour la comprendre. En ces temps, l’enseignement était très méthodique.

Les connaissances du premier degré étaient seules données tout d’abord, et tout le reste soigneusement caché. Quand le disciple s’était assimilé ces premières notions, alors seulement on lui communiquait des enseignements d’un degré supérieur. Par cette préparation les idées qu’il acquérait, les conceptions, les sentiments qui se rapportaient au monde spirituel étaient déposés jusque dans son corps astral.

Cela lui permettait de résister dans une certaine mesure aux influences de Lucifer. Car toutes les notions de la science spirituelle qui sont enseignées se rapportent aux mondes supérieurs et non à celui pour lequel Lucifer voudrait susciter un intérêt chez l’homme, non au monde sensible.
Après avoir reçu cette formation, le disciple allait être conduit à découvrir le monde supérieur. Il fallait pour cela qu’il pût refléter jusque dans son corps éthérique tout ce qu’il avait élaboré dans son corps astral.

Car on ne parvient à une vision du monde spirituel que si tout ce qui a été déposé par l’étude dans le corps astral commence à vivre en soi si fortement que non seulement celui-ci mais aussi le corps éthérique, plus dense, en reçoit l’effet.

Quand le disciple devait s’élever de l’étude à la contemplation, ce qu’on lui avait enseigné devait aboutir à un résultat. C’est pourquoi, dans les antiques époques de l’Inde, de la Perse, de l’Égypte et de la Grèce, une sorte d’acte final clôturait la période d’instruction, et consistait en ceci :

Le disciple passait par une dernière préparation, non pas d’étude, mais de méditation, et par certains exercices destinés à développer la fermeté intérieure, le calme intérieur, l’objectivité intérieure. On le préparait à ce que son corps astral fût parfaitement familiarisé avec les mondes spirituels ; et, couronnement suprême, au moment approprié il était plongé trois jours et demi dans un état comparable à la mort. Tandis qu’aux temps atlantéens, le corps éthérique était encore très aisément séparable du corps physique, il fallait maintenant pour cela que l’homme fût plongé dans le sommeil.

Il était mis alors soit dans une sorte de tombeau, soit sur une croix où on l’attachait avec des cordes, soit encore en un autre lieu. Et celui qu’on appelle l’éveilleur ou le hiérophante avait le pouvoir d’agir sur le corps astral et particulièrement sur le corps éthérique qu’on séparait du physique pendant ces trois jours. Cet état différait de celui du sommeil. Dans le sommeil, le corps astral et le moi quittent le corps physique et éthérique, tandis qu’ici, dans cet acte final de l’initiation, le corps physique demeure seul et le corps éthérique s’en détache, (du moins en grande partie, dans le haut du corps, le bas du corps physique restant attaché à l’éthérique).

Ce sommeil ressemblait à la mort. Tout ce que l’homme avait appris auparavant par la méditation et d’autres exercices s’imprimait alors dans le corps éthérique tandis qu’il était en cet état. Pendant ces trois jours et demi, l’homme parcourait réellement les mondes spirituels où se trouvent les hautes entités. Au bout de ce temps le hiérophante avait le pouvoir de le réveiller ; et le disciple rapportait en lui le souvenir du monde spirituel. Désormais son regard plongeait dans ce monde, et il pouvait annoncer aux autres hommes les faits qu’il y avait vus, lorsque ceux-là n’avaient pas la maturité nécessaire pour les voir eux-mêmes.

Ainsi, dans ces temps pré-chrétiens, les anciens maîtres furent initiés aux profondeurs des mystères sous la conduite du hiérophante, et ils furent les témoins vivants d’une existence spirituelle derrière le monde physique, d’un monde spirituel dont l’homme fait partie par ce qu’il y a de plus haut en lui, et dans lequel il doit pouvoir entrer. Mais l’évolution se poursuivait. Ce que je vous ai décrit eut le plus d’intensité immédiatement après la catastrophe atlantéenne. Cependant le lien se soudait entre corps éthérique et corps physique, et ce procédé d’initiation devenait de plus en plus périlleux.

Les hommes s’habituaient toujours davantage à une conscience physique des choses. C’est d’ailleurs le sens de l’évolution humaine que les hommes se familiarisent avec ce monde physique et l’aiment. Le grand progrès de l’humanité consiste en ce qu’ils ont vraiment pu développer cet amour pour le corps physique. Aux premiers temps post-atlantéens les hommes eurent encore un souvenir très vif du monde spirituel.

Ils pouvaient même plonger leur regard dans les mondes spirituels de leurs ancêtres. Ils possédaient encore leur conscience instinctive, crépusculaire, et savaient où se trouve la vérité, où est la patrie d’origine. Ce qui nous entoure pendant la veille, pensaient-ils, c’est un voile qui enveloppe la réalité et nous cache le monde spirituel ; c’est Maya, l’illusion ! Il avait fallu du temps pour s’habituer à ce que les yeux pouvaient voir maintenant. On ne comprenait pas facilement qu’il ait fallu pour cela perdre la conscience de l’antique demeure des esprits.
C’est pourquoi ce temps fut celui où l’on put le plus aisément reconduire l’homme vers l’esprit dont il avait gardé un goût très vif. Les choses ne purent naturellement rester ainsi, car c’est la mission de la Terre que les hommes apprennent à aimer cette Terre, à conquérir le plan physique. Si vous pouviez contempler l’époque de l’Inde antique, vous y verriez que la vie de l’esprit avait un niveau spirituel élevé. Ce que les maîtres enseignaient alors ne peut être rendu à la compréhension moderne que par une étude de la Science spirituelle. Sinon, l’enseignement des grands Rîshis semble privé de sens, pure folie.

La vision spirituelle était considérable, mais par contre on ignorait encore le maniement des plus simples outils ; on vivait de la façon la plus primitive. Il n’existait pas encore de science, car dans le plan physique on ne voyait encore que « Maya », l’illusion, et l’on n’attribuait de réalité qu’au grand Être solaire ou à des entités de même nature. Mais on ne pouvait en rester là. Parmi ces hommes post-atlantéens, quelques-uns apparurent qui nourrirent la volonté de conquérir le domaine terrestre. C’est à l’époque de Zoroastre que cette conquête commence, et la transition de l’Inde antique à la Perse préhistorique est de grande importance. Pour Zoroastre, le monde extérieur n’est plus seulement Maya. La nature physique qui nous entoure a sa valeur, même si on voit derrière elle l’esprit.

Tandis que, pour l’Hindou, la fleur même était Maya, et que la réalité, l’esprit, était derrière cette fleur, Zoroastre aurait dit : Cette fleur est estimable en elle-même, car elle est un fragment de l’esprit universel ; la matière naît de l’esprit. Nous avons déjà remarqué que pour Zoroastre, le Soleil physique était le lieu d’activités d’entités spirituelles. Par contre, l’initiation était devenue d’un accès plus difficile, et une discipline plus sévère devait s’imposer à ceux qui ne voulaient pas seulement croire à l’existence d’un homme spirituel, mais qui désiraient plonger leurs regards dans la grande aura solaire.

Toutes les conditions de vie se transformèrent ainsi peu à peu et à l’époque suivante, celle de la civilisation égypto-chaldéenne, l’homme conquit plus profondément encore le monde physique.

C’est le temps où il ne possède plus seulement la connaissance de la sagesse spirituelle, résidant derrière la matière, mais où il contemple la marche des astres et s’attache à reconnaître dans leurs positions et leurs mouvements visibles une écriture tracée par des dieux. Les rapports des objets sensibles entre eux lui révèlent aussi cette écriture divine. En Égypte apparaît une géométrie qui va être appliquée aux choses extérieures. Ainsi l’homme fait la conquête du monde qui l’entoure. Le Grec fait un pas de plus dans cette voie, et une alliance se noue entre ce que l’âme ressent et la matière extérieure. La statue d’une Pallas Athéna ou d’un Zeus reflète des expériences qui d’abord ont vécu dans l’âme humaine, et de là se sont imprimées dans la matière.

Mais à mesure que l’homme acquiert une puissance plus grande dans le monde sensible qu’il se met à aimer toujours davantage, c’est le monde spirituel et le temps qui s’écoule entre la mort et une nouvelle naissance qui lui deviennent étrangers. Quand l’âme d’un ancien Hindou se détachait du corps pour entrer dans le monde spirituel et y demeurer jusqu’à la vie suivante, l’activité de l’esprit était encore très grande. Car, pendant toute sa vie sur Terre, cette âme s’était cultivée spirituellement et toutes ses sensations s’étaient enflammées des récits qu’elle avait entendus sur les mondes spirituels, même si elle n’avait pas subi d’initiation.

À la mort, tout lui devenait lumineux et clair. Mais à mesure que les hommes s’éprirent du monde physique, apprirent à vivre heureux sur Terre, c’est la vie qui s’écoule après la mort qui s’obscurcit pour eux. Et à l’époque égyptienne on peut affirmer que l’âme qui se détachait du corps pour entrer dans le monde spirituel se trouvait déjà enveloppée d’obscurité et de ténèbres, s’y sentait seule et séparée des autres âmes ; un sentiment de froid s’emparait d’elle devant cet isolement.

Quant aux Grecs qui avaient su introduire dans la civilisation une si grande beauté de formes, ils ressentaient plus intensément encore ce froid et ces ténèbres de l’âme entre la mort et une nouvelle naissance. Ce n’est pas une légende, mais une vérité profonde, cette parole prêtée à un Grec qu’on interrogeait sur le séjour dans le monde souterrain :

« Mieux vaut, disait-il, être un mendiant sur Terre qu’un roi dans le royaume des ombres ! »

Ainsi l’homme devenait peu à peu étranger au monde spirituel. Les initiés se firent de plus en plus rares, car il était de plus en plus dangereux de passer par l’initiation, de demeurer trois jours et demi dans un état semblable à la mort et de tenter de détacher le corps éthérique sans pourtant que la mort s’ensuivît. C’est alors qu’une impulsion nouvelle fut donnée à toute la vie humaine par l’événement du Christ, ce haut esprit solaire qui descendait peu à peu vers la Terre. Nous avons vu qu’au temps de Zoroastre, on pouvait le trouver dans l’aura du Soleil, « Ahura Mazdâ » ; Moïse avait déjà pu le contempler dans le Buisson-ardent et le feu du Sinaï. Il descendait peu à peu vers cette sphère terrestre qu’il allait transformer. Il fallait que les hommes apprissent à connaître cet Esprit sur la Terre.

Toute ancienne forme d’initiation comporta donc un dégagement du corps éthérique hors du corps physique, et jusque dans les initiations post-atlantéennes ce sommeil semblable à la mort, c’est-à-dire cette inconscience physique, fut une condition nécessaire. Par là l’homme entrait sous la domination d’un autre « je », celui de son initiateur, de son maître. Il quittait entièrement son corps physique et son moi propre n’avait plus aucune action sur ce corps physique.

Or, le but essentiel de l’impulsion christique, c’est justement que le moi de l’homme accomplisse une évolution qui repose entièrement sur les forces individuelles et qui ne le contraigne pas à passer par un état inférieur à celui du « je », pour pouvoir entrer dans les mondes spirituels. Il fut pour cela nécessaire qu’un Être se sacrifiât, pour recevoir dans un corps humain l’esprit du Christ. À travers d’innombrables incarnations, un initié se prépara, afin d’être à la hauteur de cette tâche, et pouvoir à un moment donné dégager de lui son moi personnel pour recevoir à la place l’esprit du Christ. Voilà ce que décrit dans l’Évangile de Jean la scène du baptême dans le Jourdain.

Ce baptême est célébré par le précurseur du Christ Jésus, Jean-Baptiste, et donné à ceux qu’il a prédisposés à recevoir le Christ sous cette forme. Si nous réfléchissons que Jean-Baptiste baptisait pour préparer la descente du Christ, nous comprenons ce que dit l’Évangile de Jean sur ce baptême. Songez à ce qu’est le baptême de nos jours. Ce n’est qu’une imitation du symbole primitif et sous cette forme, il ne vous donne pas la clé de l’énigme. Le baptême ne consistait pas alors à asperger d’eau le néophyte, mais celui-ci était plongé complètement sous l’eau où il devait rester un temps plus ou moins long. Pour comprendre ce que cela signifie, il faut se rappeler la composition mystérieuse de l’être humain.

Rappelez-vous qu’il se compose d’un corps physique, d’un corps éthérique, d’un corps astral et d’un moi, qui sont, à l’état de veille, fortement liés les uns aux autres, mais séparés deux à deux pendant le sommeil. À la mort, le corps physique demeure seul ; le corps éthérique s’est détaché de lui et reste un temps assez court uni au corps astral et au moi. C’est à ce moment que se produit une expérience intérieure très caractéristique : la vie passée défile toute entière comme en un grand tableau ; les événements de la vie s’étendent comme un panorama autour de l’homme.

Le corps éthérique est totalement le porteur de la mémoire, pendant la vie sur Terre ; sans le corps physique, l’homme pourrait voir sans cesse ce panorama qu’offre le corps éthérique. Quand l’homme est privé du corps physique par la mort, toute cette vision rétrospective afflue dans sa conscience ; elle peut aussi survenir dans les cas de danger de mort, de grande frayeur, de choc. C’est ce qu’on sait par les récits de ceux qui ont failli se noyer ou tomber dans un précipice, et qui ont revécu en un grand tableau toute leur vie passée. Ce que le danger peut ainsi faire ressentir à l’homme, lorsqu’il est par exemple sur le point de se noyer, c’est ce qu’éprouvaient les disciples de Jean-Baptiste.

Le baptême consistait en ce que chacun d’eux demeurât sous l’eau assez de temps pour qu’il revécût sa vie, et ce qu’il revivait ainsi était un tableau spirituel. Et dans cet état anormal, ce que son esprit avait ressenti le mettait en communication avec tout le monde spirituel. Après avoir reçu ce baptême de Jean-Baptiste, on savait qu’il existe un monde spirituel, et on pouvait se dire : en vérité, ce qui vit en moi peut aussi exister sans mon corps. On tirait de ce baptême la conviction qu’un monde existe auquel on appartient par l’esprit.

Jusque-là, les hommes avaient ressenti un penchant toujours plus fort vers le monde physique, une tendance toujours plus grande à croire que cette réalité physique était la seule réalité. Mais ceux qui venaient vers le Baptiste avaient compris que leur vie était de nature spirituelle, et qu’ils étaient autre chose que ce que le corps physique faisait d’eux. C’est pourquoi les disciples de Jean-Baptiste, en l’entendant dire : Changez votre façon d’être… se transformaient dans leur esprit lorsqu’ils avaient vraiment tiré du baptême tout son enseignement. Ils avaient appris qu’en eux vivait quelque chose de spirituel, que leur moi fait partie du monde spirituel.

Et cette conviction, ils l’avaient acquise dans le corps physique. Point de procédé spécial comme dans l’initiation, mais cette conviction reçue dans le corps physique et suivant l’enseignement qui, depuis Moïse, avait été déposé dans les âmes. Toute cette expérience prenait au baptême de Jean un sens nouveau, et le disciple n’avait pas seulement conscience après le baptême de s’être uni au monde spirituel, mais il comprenait aussi quel était le monde spirituel qui descendait sur la Terre. Il comprenait que ce qui s’était révélé à Moïse, le « ejeh asher ejeh » dans le Buisson-ardent et dans le feu du Sinaï, était ce qui parcourt la Terre et s’exprime par le nom de Iahvé ou Jéhovah, ou encore « Je suis le JE SUIS ». Car ainsi s’exprime vraiment le monde spirituel.

Ainsi, par le baptême de Jean, non seulement le disciple savait qu’il était uni au monde spirituel, mais il savait aussi : « Dans ce monde spirituel vit le JE SUIS dont mon esprit est né. » C’est ainsi que par le baptême Jean préparait ses disciples. Et tel est le sentiment qu’il avait éveillé en eux. Ils ne pouvaient naturellement être qu’un petit groupe, car le plus grand nombre était encore incapable de vivre cette expérience dans le baptême. Mais quelques-uns reconnaissaient que l’esprit qui allait plus tard être appelé le Christ s’approchait de la Terre.

Essayez maintenant de comparer ce que nous venons de dire avec la conférence d’hier. L’action ancienne des êtres spirituels avait porté sur un amour qui ne reposait que sur les liens du sang. Mais les esprits lucifériens avaient permis à chacun de trouver sa propre individualité. Lucifer avait collaboré avec les êtres spirituels les plus hauts, et peu à peu les liens du sang s’étaient relâchés. C’est ce que vous pouvez suivre par vous-même dans l’histoire. (Voyez quel mélange de peuples compose le vaste empire romain). Si tout cela avait été possible, c’est que les liens du sang s’étaient relâchés, c’est que la personnalité s’affermissait ; mais en revanche les hommes avaient perdu leur attache avec le monde spirituel et s’étaient épris de la Terre, du plan physique.

Dans la mesure où la conscience de soi s’était accrue sous l’action de Lucifer, l’homme s’était attaché au plan physique, et la vie qui s’écoulait pour lui entre la mort et une nouvelle naissance s’était éteinte à ses yeux. L’action de Jean-Baptiste avait déjà introduit un événement essentiel ; elle avait permis que l’homme conservât son individualité et retrouvât pendant le temps de l’immersion du baptême cette même origine spirituelle qu’il avait autrefois appelée « les dieux » lorsqu’il vivait encore dans ces vapeurs d’eau qui remplissaient l’atmosphère. Ce souvenir d’avoir vécu dans les mondes divins se ranimait alors, et bien que l’homme eût acquis un moi, il s’était préparé à créer des liens avec les autres hommes, mais cette fois les liens d’un amour spiritualisé.

Voici encore comment se caractérise sous un autre aspect l’événement du Christ : Le Christ représente cette force spirituelle de l’amour descendant sur notre Terre, force qui n’est encore aujourd’hui qu’au début de son activité. À la lumière des Évangiles de Jean et de Luc, suivons cette pensée que l’essence même de l’impulsion christique, c’est l’amour spirituel, l’amour par lequel les différents moi autrefois séparés se rapprocheront de plus en plus, mais par le dedans de l’âme.

Les hommes n’ont encore pu que pressentir ce que le Christ est devenu pour le monde ; car cet idéal n’est encore que bien faiblement réalisé. La force de séparation qui est le résultat des actions lucifériennes existe toujours, et le principe du Christ ne s’est encore exercé que depuis fort peu de temps. Bien qu’on cherche actuellement à réaliser l’harmonie et l’accord des âmes dans certains domaines extérieurs de la vie, les hommes ne se doutent, pas encore de ce que cette harmonie pourrait être pour les choses les plus intimes et les plus importantes de la vie (s’ils le pressentent, c’est tout au plus par une idée abstraite qui, dans ce domaine, est bien ce qui a le moins de valeur).

En vérité, le christianisme n’en est qu’à son début ; de plus en plus, il pénétrera dans les âmes, et il ennoblira le « je ». Les peuples encore jeunes s’en aperçoivent. Ils voient que, pour aller de l’avant, il leur faut s’unir à la force du Christ, s’en pénétrer. Un penseur moderne, exécuteur testamentaire du grand philosophe Soloviev, a dit : « C’est le christianisme qui doit faire de nous un peuple uni ; ou alors nous perdrons notre moi et avec lui la possibilité de jamais devenir un peuple ! » C’est là une grande parole chrétienne, qui semble être née d’une pensée forte.

Mais elle nous fait sentir combien il est nécessaire que le christianisme pénètre jusqu’au fond de notre âme. Prenez un exemple qui permette de comprendre combien l’âme des plus grandes et des plus nobles personnalités est encore loin de tout ce que donnera le christianisme quand il aura vivifié les pensées et les sentiments les plus profonds de l’homme. Pensez à Tolstoï, à toute l’activité qu’il a dépensée dans la dernière période de sa vie pour essayer de découvrir le sens véritable du christianisme. Un penseur de sa taille peut inspirer une immense admiration - surtout en occident, où l’on remplirait toute une bibliothèque de subtilités philosophiques sur un sujet comme celui que Tolstoï a magistralement traité dans son livre « Sur la Vie ».

Il y a dans l’œuvre de Tolstoï des pages qui renferment, décrites d’une façon un peu primitive, certaines grandes vérités théosophiques, auxquelles le philosophe occidental accède difficilement. On pourrait dire qu’on sent vibrer en Tolstoï l’impulsion christique. Étudiez son œuvre à fond, et vous verrez qu’elle en est toute remplie. Prenez maintenant son grand contemporain Soloviev : il nous intéresse déjà parce qu’il a su, en partant d’une large conception philosophique, atteindre jusqu’au bord de la vision réelle des choses, au point d’embrasser du regard comme en une perspective prophétique, toute une époque.

Les images qu’il en voit sont déformées, parce que son point de départ n’est pas le bon ; cependant il arrive jusqu’à voir l’avenir, et c’est ainsi qu’il nous donne des visions prophétiques du XXe siècle, où nous trouvons beaucoup de grandeur et de noblesse, notamment en ce qui concerne le christianisme. Mais il considère Tolstoï comme un ennemi du christianisme, comme l’Antéchrist !

Il est donc possible que deux hommes, profondément convaincus de donner le meilleur d’eux-mêmes, ce qu’il y a de plus profond dans leur âme, restent face à face sans se comprendre, de sorte que l’un est « l’anti » de l’autre ! L’amour qui unira les hommes sera toute autre chose que ce que nous voyons s’exprimer aujourd’hui même chez les plus nobles esprits, lorsque l’harmonie extérieure et l’amour auront pénétré la vie, et que l’impulsion christique aura vivifié jusqu’au plus profond de nous-mêmes.

Cette impulsion commence seulement à se faire sentir, mais elle sera comprise de mieux en mieux. Que faut-il donc à tous ceux de nos contemporains qui appellent le christianisme, proclament sa nécessité, mais qui pourtant ne peuvent l’atteindre ? Il leur faut l’anthroposophie, la science spirituelle, la voie actuelle qui conduit vers le Christ ! Car Il est si grand, que chaque époque devra trouver des chemins nouveaux pour arriver jusqu’à Lui. On a connu autrefois des méthodes que remplace aujourd’hui l’anthroposophie. Et l’anthroposophie restera longtemps encore la méthode qui permet de comprendre le Christ, car elle vivifie et stimule les facultés humaines. L’homme s’élèvera de plus en plus dans sa compréhension du Christ. La conception anthroposophique n’est pas éternelle, nous le savons bien. Car les grandes vérités que nous exprimons sous des formes périssables devront toujours trouver des formes de plus en plus vastes.

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Source : Rudolf Steiner - L’Évangile de Saint Jean dans ses rapports avec les trois autres Évangiles et notamment avec celui de Luc.





Pascal Patry
Praticien en psychothérapie
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Psychanalyste

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