Faute et charité
Pendant tout le Moyen Âge, les problèmes posés par les « insensés » sont encore traités en dehors du domaine médical. Le progrès médical de la Renaissance est freiné par deux mentalités : l'univers de la faute, la posture de charité.
I ♦ Mentalité fautive
• La peste, la lèpre, les maladies vénériennes, les calamités de grande envergure font régner une menace pesante mêlant les interprétations extraordinaires à la connaissance du naturel.
• Au XVI , la folie est encore conçue comme :
- châtiment divin sanctionnant le péché ;
- oeuvre du démon dans sa tentative d'hérésie ou de subversion ;
- mal qu'il faut purifier : on brûle les déments, soupçonnés de sorcellerie.
On croit davantage à l'exorcisme, à l'enchaînement des diabolisés, à la suppression des possédés qu'aux soins médicaux.
Ce sont les autorités ecclésiastiques ou civiles qui sont appelées à intervenir – non pas les médecins. La population crédule a peur de la folie et croit en la punition surnaturelle par la démence.
II ♦ Mentalité charitable
• Dans les années 1550, le médecin théologien chrétien Jean de Weyer est frappé par le respect porté en Islam aux insensés, considérés en tant que pauvres victimes de maladies, et non possédés du démon.
• Son oeuvre – qui provoque des résistances – imprime un virage définitif : la chrétienté redéfinit ses méthodes de charité et fait du soin aux malades, en particulier aux déments, un devoir religieux.
• Via les ordres monastiques, les asiles se répandent rapidement en Europe, où les malades sont « soignés » : accueil, hygiène, nourriture, accompagnement moral, voire spirituel.
• Ces considérations charitables provoquent une attitude ambiguë des pouvoirs : certains
fous, personnages troublants, sont honorés, reçus dans les Cours royales. Fréquenter ces
fous devient à la mode aristocrate : amusement.
