Quelles améliorations pour la formation des thérapeutes ?
Publié par Pascal Patry dans Psychologie · Lundi 09 Sep 2024
Tags: formation, thérapeutes, améliorations
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Quelles améliorations pour la formation des thérapeutes ?Vers une approche plus pratique et multidisciplinaireInquiétude dans la formation des futurs thérapeutesIl est inquiétant de constater des lacunes profondes dans la formation des futurs thérapeutes, formations souvent trop théoriques et déconnectées de la réalité clinique.Article lié : La pratique cliniqueComment ne pas être consterné et attristé en voyant que l’enseignement universitaire tend à privilégier un savoir académique rigide, principalement basé sur des manuels, sans offrir aux étudiants une réelle opportunité de développer des compétences cliniques concrètes.N'est-il pas alarmant que le système universitaire, avec ses cours magistraux et ses approches décontextualisées, perpétue une forme de spécialisation en psychothérapie qui ne prépare pas suffisamment les étudiants aux défis réels de ce métier ? Peut-on accepter de voir la thérapie réduite à une simple extension d’un master universitaire, sans l’âme et la créativité nécessaires à une pratique clinique authentique ?Les êtres en souffrance dans la société peuvent-ils accepter le fait de se retrouver devant un praticien qui est devenu un produit commercialisable au regard des critères économiques actuels ? De plus, ne voit-on pas se profiler à l'horizon des formations basées sur le scientisme pouvant conduire à tout, même au pire ? [1].Devenir un bon thérapeute demande à passer par une formation pratique intensive, sous la supervision de professionnels expérimentés. Comment ne pas s'insurger contre l’idée qu’on puisse former de futurs thérapeutes sans leur offrir un accès systématique à des stages pratiques et à des supervisions cliniques continues. Ce manque de formation personnelle n'est-il pas inadmissible du fait qu’il empêche les étudiants de développer les ressources émotionnelles et relationnelles nécessaires pour accompagner leurs futurs patients.Comment ne pas être préoccupé par le fait que la définition des programmes de formation en psychothérapie en France semble davantage être dictée par les institutions académiques que par les professionnels de terrain. Ne serait-il pas impératif que la formation soit alignée sur les besoins réels de la pratique clinique, et non sur une vision théorique et désincarnée du métier [2].N'est-il pas regrettable de constater que certaines contraintes administratives en vigueur en France créent des barrières injustifiées pour l’accès à la formation en psychothérapie.Limiter cet accès à une seule catégorie de professionnels, au détriment d’une approche multidisciplinaire, prive le domaine thérapeutique de la richesse des compétences variées que pourraient apporter d’autres professionnels de la santé mentale [3].N'est-il pas grand temps de repenser le modèle de formation en psychothérapie. Ne devrions-nous pas prendre exemple sur d’autres pays où la valorisation des compétences pratiques et la diversité des approches permettent de former des thérapeutes véritablement préparés à affronter les complexités du métier.Pouvons-nous continuer à fonctionner sur des modèles dépassés qui ne font que reproduire des connaissances livresques sans ancrage dans la réalité clinique ?***Notes[1] - Un thérapeute doit posséder plusieurs qualités essentielles qui se divisent en compétences personnelles, relationnelles et techniques, s’il a pour vocation de mener à bien sa pratique.Les compétences personnelles portent sur l'empathie et la sensibilité émotionnelle. En effet, le thérapeute doit être capable de ressentir et de comprendre les émotions des autres sans se laisser submerger. Cela implique une écoute active et une attention authentique à l'autre.Le thérapeute doit être capable d'introspection et de réflexion personnelle, ce qui nécessite une formation personnelle solide, afin de comprendre ses propres mécanismes émotionnels et éviter les projections inconscientes sur les patients.Cela inclut une capacité à reconnaître ses propres limites ; biais et vulnérabilités. Il importe au thérapeute de développer la résilience émotionnelle ; en effet, face à l'exposition répétée aux souffrances et aux drames humains, il doit être capable de maintenir son équilibre émotionnel, tout en offrant un soutien stable et constant à ses patients.Patience et tolérances face à l'incertitude seront de mise, car la thérapie est un processus souvent long et complexe, qui nécessite de la patience et une acceptation de l'incertitude. Le thérapeute doit être à l'aise avec le fait que les progrès peuvent être lents et non linéaires.Du point de vue des compétences relationnelles, le thérapeute aura la capacité à établir une alliance thérapeutique, c'est-à-dire créer un lien de confiance avec le patient, ce qui sera fondamental. Il doit savoir instaurer un climat de sécurité, où le patient se sent écouté et compris, sans jugement.Il doit être capable d'exprimer des idées complexes de manière accessible tout en restant attentif aux besoins émotionnels du patient. Une communication efficace inclut la capacité de poser des questions ouvertes et d'encourager l'exploration intérieure du patient.Il ne doit jamais oublier que chaque patient est unique, et qu'il doit savoir s'adapter en fonction des besoins individuels. Cela implique de ne pas s'enfermer dans des dogmes théoriques, mais de rester ouvert aux différentes manières de travailler avec des patients variés.Les concepts théoriques et les techniques psychothérapeutiques devront être maîtrisés. Sans une solide compréhension des bases théoriques de la psychothérapie (psychanalyse, thérapie cognitivo-comportementale, thérapies humanistes, etc.) on n'aboutit à rien de sérieux en termes d'avancée du travail psychothérapique. Le thérapeute doit pouvoir appliquer ces concepts dans un contexte clinique de manière flexible et adaptée.Le thérapeute discutera régulièrement de ses cas avec un superviseur expérimenté pour obtenir un retour critique sur sa pratique. Cela permet de maintenir une vigilance clinique et d'améliorer ses compétences.On ne devient pas thérapeute sans l'indispensable expérience de la pratique. La capacité à observer, analyser et interpréter les comportements, les émotions et les interactions dans le cadre thérapeutique ne peut s'acquérir que par une immersion continue dans la pratique clinique.Les éléments entendus est observés durant la pratique doivent rester confidentiel dans le respect du cadre déontologique. Le respect strict de la confidentialité et des règles éthiques de la profession est un impératif.Le thérapeute doit garantir un environnement sûr et protéger les intérêts de ses patients.Le thérapeute doit être conscient que la formation ne s'arrête jamais, ce qui doit le mener à une profonde humilité et à un engagement à apprendre de manière permanente. Il est important de rester humble face à la complexité de l'esprit humain et de continuer à se former tout au long de sa carrière.Avoir la capacité de travailler en équipe pluridisciplinaire et à collaborer avec des confrères est une qualité essentielle, afin de partager différents points de vue et offrir un soin holistique au patient.Un thérapeute apte à accompagner une personne dans la résolution d'une problématique combine une profonde sensibilité humaine avec une rigueur clinique, tout en étant capable de réflexion sur soi-même et de travail en collaboration avec d'autres professionnels.Il doit rester flexible dans son approche, toujours à l’écoute de l’expérience unique de chaque patient, tout en continuant à évoluer et à se former en permanence.[2] - Dans certaines universités, le cursus de psychologie met davantage l’accent sur l’apprentissage théorique et scientifique, plutôt que sur une pratique véritablement humaine.Par exemple, les étudiants peuvent valider des années de formation avec des heures limitées de stages pratiques. Cela signifie que beaucoup de diplômés arrivent en formation de psychothérapie sans avoir eu une véritable expérience clinique.Un exemple concret serait un étudiant qui termine un master en psychologie avec seulement quelques mois de stage en observation, sans avoir réellement mené d'entretiens cliniques supervisés.Le parcours académique valorise fortement la recherche théorique, souvent déconnectée de la réalité clinique. Par exemple, les étudiants en psychologie peuvent être encouragés à produire des mémoires de recherche sur des thèmes abstraits ou très spécialisés, plutôt que de se concentrer sur des études de cas cliniques ou des analyses pratiques. Cette focalisation sur la recherche universitaire peut conduire à une formation moins adaptée à la réalité du travail thérapeutique, où la compréhension et l’accompagnement des patients sont primordiaux.Certains programmes de formation en psychothérapie restent centrés sur des théories anciennes ou des approches théoriques spécifiques qui ne correspondent pas forcément aux besoins actuels des patients ou aux évolutions des pratiques cliniques.Par exemple, un programme peut imposer l’apprentissage d’une approche unique, comme la psychanalyse freudienne ou la thérapie cognitivo-comportementale, sans offrir de formation sur d’autres courants thérapeutiques émergents ou complémentaires (thérapie intégrative, thérapies basées sur la pleine conscience, etc.). Cela peut limiter la capacité des futurs thérapeutes à s’adapter aux divers besoins de leurs patients.Contrairement à certains pays où les supervisions cliniques sont intégrées dès le début de la formation, les étudiants en psychologie en France ont souvent peu d’opportunités d’être supervisés par des professionnels expérimentés pendant leurs études.Par exemple, un étudiant peut avoir une formation universitaire complète sans jamais avoir bénéficié de supervision régulière sur des cas réels, ce qui limite son apprentissage clinique. Une formation qui ne prend pas en compte l’importance de la supervision néglige un aspect crucial du développement des compétences thérapeutiques.Les institutions académiques peuvent exiger des étudiants qu’ils passent plus de temps à accumuler des crédits de cours théoriques, au détriment de l’expérience pratique.Par exemple, un étudiant peut passer des heures à étudier des concepts psychologiques en classe, mais recevoir peu de formation sur des compétences cruciales comme l’entretien clinique, l'observation relationnelle ou l'analyse des dynamiques de groupe.Ce déséquilibre peut créer un décalage entre ce que les étudiants apprennent à l’université et ce dont ils ont réellement besoin pour travailler sur le terrain.L’accent est excessivement mis sur la théorie et la recherche académique dans la formation en thérapie et cela peut nuire à la préparation des futurs professionnels, qui se retrouvent souvent mal outillés pour faire face aux défis réels de la pratique clinique.[3] - Il est regrettable que certaines contraintes administratives en vigueur en France créent des barrières injustifiées pour l’accès à la formation en thérapie. En effet, les régulations actuelles limitent l’accès à cette formation à une seule catégorie de professionnels, en l’occurrence les psychologues diplômés, au détriment d’une approche véritablement multidisciplinaire.Cette restriction rigide prive non seulement le domaine de la psychothérapie de la diversité des compétences, mais limite également l'enrichissement mutuel entre les différentes disciplines de la santé en général et de la santé mentale mentale en particulier.Bien que les psychiatres soient légitimement reconnus comme des praticiens de la santé mentale, leur formation n’inclut pas nécessairement une formation approfondie en psychothérapie.En France, ils sont souvent considérés comme psychothérapeutes par défaut en raison de leur spécialisation médicale, alors que certains n’ont reçu qu’une formation théorique en psychopathologie sans avoir véritablement acquis les compétences pratiques nécessaires pour mener une psychothérapie.Cette situation est paradoxale car elle permet à des professionnels dont la formation psychothérapeutique est insuffisante d’exercer, tandis que d’autres praticiens plus qualifiés pourraient se voir refuser l'accès à la profession.Une autre conséquence regrettable des contraintes administratives actuelles est l’exclusion de certains professionnels de la santé mentale, comme les travailleurs sociaux ou les infirmiers psychiatriques, de l’accès à la formation en psychothérapie.Ces professionnels, qui sont souvent en première ligne dans l’accompagnement des patients, ont une expérience précieuse dans la gestion des crises, l’écoute empathique, et l’accompagnement quotidien de personnes en détresse psychologique.En les écartant de la possibilité de se former en psychothérapie, on prive le domaine d’une perspective précieuse, issue d’années de travail direct avec les patients.Un autre obstacle est le manque de reconnaissance officielle des formations non académiques ou alternatives en psychothérapie. Les formations en psychothérapie offertes par des instituts privés ou des associations reconnues pour leur excellence clinique sont souvent ignorées par le système universitaire rigide.Par exemple, certaines écoles de formation en psychothérapie humaniste, intégrative ou systémique ne bénéficient pas de la même légitimité que les diplômes universitaires, même si elles offrent une formation pratique et supervisée de qualité.Cela restreint l'accès à des courants thérapeutiques innovants et empêche les futurs thérapeutes d'explorer des approches différentes de celles enseignées à l'université.En limitant l’accès à la formation en psychothérapie aux seules personnes ayant un parcours académique standardisé, les régulations actuelles freinent également l’innovation dans le domaine thérapeutique.Les praticiens issus de parcours non traditionnels, qui pourraient apporter de nouvelles approches et techniques thérapeutiques, se trouvent exclus du champ psychothérapeutique.Cela crée une homogénéité dans les pratiques thérapeutiques, là où une diversité des approches pourrait enrichir les soins offerts aux patients.Dans d’autres pays, comme les États-Unis ou le Royaume-Uni, des professionnels issus de parcours variés (art-thérapeutes, spécialistes en thérapies corporelles, etc.) peuvent accéder à la formation en psychothérapie, ce qui permet une approche plus holistique et innovante des soins.En excluant certains professionnels de la formation en psychothérapie, on perd également une richesse dans l’approche multidisciplinaire des soins en santé mentale. Une prise en charge intégrée et coordonnée par des équipes pluridisciplinaires (psychiatres, psychologues, travailleurs sociaux, infirmiers, art-thérapeutes) permet de mieux répondre aux besoins complexes des patients.Or, les contraintes administratives actuelles créent des cloisons entre ces disciplines, là où une collaboration étroite serait nécessaire pour offrir des soins globaux et cohérents.Les critères d'admission dans les programmes de formation en psychothérapie sont souvent rigides et ne prennent pas en compte les compétences et l'expérience acquises sur le terrain par d'autres professionnels.Par exemple, un infirmier psychiatrique avec des années d'expérience dans le traitement de patients souffrant de troubles mentaux graves peut se voir refuser l'accès à une formation en psychothérapie simplement parce qu'il ne possède pas un diplôme en psychologie.Cette rigidité empêche l’accès à des professionnels qui pourraient apporter des contributions significatives au domaine de la psychothérapie.Toutes ces barrières administratives rigidifient le domaine de la psychothérapie en France, empêchant la formation d'une génération de thérapeutes véritablement polyvalents et multidisciplinaires.Pour favoriser une meilleure prise en charge des patients, il est impératif d’élargir l’accès à la formation en psychothérapie à d’autres professionnels de la santé mentale, tout en s’assurant que les compétences cliniques nécessaires sont effectivement acquises.Une réforme en profondeur des critères d’accès à cette profession permettrait de créer une psychothérapie plus inclusive, plus diversifiée et plus adaptée aux défis de la société moderne.
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